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14/06/2005

Famille

Successions : coup de canif dans la réserve

En assouplissant les contraintes de la réserve et en favorisant les sauts de génération, le droit français se met au diapason européen.

À peine la réforme du divorce est-elle entrée en vigueur, que le garde des Sceaux lance la réforme des successions avec pour objectif de renforcer la liberté de disposer de ses biens. Le projet est ambitieux puisqu'il n'est ni plus ni moins question que de toucher à la sacro-sainte réserve héréditaire afin de permettre à tout un chacun, en accord avec ses héritiers, d'organiser plus librement, à l'avance, la transmission de son patrimoine.

De même, la donation-partage ne serait plus limitée aux descendants au premier degré mais pourrait intégrer les petits-enfants.

Les innovations proposées vont certainement donner lieu à d'amples discussions lors de l'examen et du vote parlementaires à l'automne prochain : les grandes lignes que nous présentons ici sont donc susceptibles de modifications.

Accélérer le règlement

« Les situations de blocage ne sont pas rares dans le règlement de la succession », déplore Me Jean-François Humbert (notaire à Paris, président de l'Institut d'études juridiques du Conseil supérieur du notariat). Un seul héritier « taisant », en effet, et tout, de la gestion au partage des biens, peut se trouver paralysé, suspendu, en attente. Pendant le délai de 30 ans, un héritier inactif ne peut pas être contraint « d'opter », ni par un autre héritier de même rang ni par un autre parent susceptible d'hériter à sa place. Seul un créancier peut l'obliger à prendre parti.

Action interrogatoire. Le projet instaure un délai de 4 mois après le décès pour permettre à chaque héritier de faire son choix : accepter purement et simplement la succession, l'accepter à concurrence de la valeur de l'actif (voir ci-dessous) ou, à l'extrême, renoncer. Passé ce délai, un héritier ou un créancier de la succession pourra provoquer l'option en adressant une sommation à l'héritier silencieux. Celui-ci aura alors un mois pour se décider et, s'il ne réagit toujours pas, il sera réputé acceptant pur et simple.

IDENTIFIER TOUS LES HÉRITIERS

Pour sécuriser la détermination des héritiers, et accélérer le règlement des successions par l'identification plus rapide de ceux-ci, les enfants déclarés ou reconnus par le défunt devant l'officier d'état civil seront mentionnés en marge de son acte de naissance. Actuellement, on sait qu'il n'est pas possible de connaître immédiatement par l'état civil l'existence d'un enfant naturel du défunt, ce qui est une source évidente de complexité, et surtout un risque de remise en cause ultérieure de l'acquis d'un partage ! La réforme, en envisageant cette mention, accroîtra la sécurité... pas complètement toutefois, car les enfants nés à l'étranger ne seront a priori pas concernés.

Demande de décharge. L'acceptation « sous bénéfice d'inventaire » deviendra acceptation « à concurrence de la valeur de l'actif ». Il ne s'agira pas seulement d'un changement de terminologie, car les mécanismes de cette option seront simplifiés pour permettre aux héritiers d'y recourir plus facilement. Mais il y a plus : même en cas d'acceptation pure et simple, un héritier pourra demander à être déchargé d'une dette qu'il avait « de justes raisons d'ignorer », si son paiement devait avoir comme conséquence « d'obérer gravement son patrimoine ». Nul doute que les conditions de cette demande de décharge auront à être précisées, dans le texte de loi lui-même, puis par la jurisprudence...

Requiem pour l'unanimité. C'est peut-être surtout l'assouplissement de l'indivision qui aura des effets pratiques immédiatement sensibles. L'article 815-3 révisé du code civil abandonnera la règle paralysante de l'unanimité pour celle de la majorité qualifiée, « d'au moins deux tiers des droits indivis », pour les actes d'administration et certains actes de disposition. Qui se plaindra de ce que le fonctionnement de l'indivision se rapproche un peu de celui d'une société ?

Autre innovation intéressante pour la période de gestion précédant le partage : les héritiers pourront accomplir des actes de gestion courante de la succession, sans pour autant que cela fasse présumer leur acceptation définitive de celle-ci.

Réserves sur la réserve

Mais l'aspect le plus révolutionnaire du projet est sans doute la faculté, pour les héritiers, de renoncer à l'avance à leurs droits réservataires, en totalité ou en partie. À ceux qui s'inquiéteraient des risques qu'une volonté sans frein du « disposant » ferait courir aux droits des héritiers, Me Jean-François Humbert rétorque que ces pactes ne se feront qu'avec accord exprès de tous, et sous les auspices du testament authentique (donc notarié). Il plaide aussi sur le fond, en estimant que cette souplesse sera très appréciable dans certaines situations familiales, notamment en présence d'un enfant handicapé, ayant besoin d'une protection patrimoniale plus importante que ses frères et sSurs, ou dans le cadre d'une famille recomposée, ou pour avantager l'héritier repreneur de la propriété et de l'entreprise familiale ou un petit-enfant. Techniquement, l'héritier signataire du pacte renoncera par avance à exercer l'action en réduction contre les libéralités faites par le défunt et portant atteinte à sa part de réserve. L'action en réduction se prescrira d'ailleurs par cinq ans au lieu de trente.

La fiscalité de la transmission patrimoniale était la vedette de la dernière loi de finances. Ce projet de réforme des successions ne comporte aucune disposition fiscale : on peut bien sûr le regretter (un nouveau barème des droits de succession ne serait pas un luxe...), mais il faut reconnaître que les innovations sur le plan civil sont, à elles seules, d'heureuses initiatives. De petites touches en grandes retouches, tout un pan du droit finit pas être mis au goût de l'époque et des besoins de ses nouvelles familles.

Publié le 14 Juin 2006

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